Tendance superficielle et dynamique à long terme
Avec la large médiatisation de ChatGPT, une forme de système basé sur des modèles d’apprentissage algorithmique, le terme « intelligence artificielle » (IA) est sur toutes les lèvres, utilisé et interprété de manière plus ou moins précise. Pour faire simple, l’IA désigne des systèmes automatisés capables de faire des prévisions, de fournir des recommandations et de prendre des décisions avec peu d’intervention ou de supervision humaine.
Les systèmes d’IA sont en progression constante dans de nombreux secteurs de l’économie et de la société. Il est cependant crucial d’analyser sobrement les espoirs et les risques liés à leur utilisation et à leur diffusion. Cela concerne également le monde du travail : alors que l’utilisation de systèmes de gestion algorithmique de l’IA dans les secteurs de la logistique et des plateformes a déjà suscité l’attention publique, son déploiement dans d’autres domaines, comme l’administration (publique), gagne également en visibilité
De nombreuses opportunités, mais aussi des risques et des limites connues
L’utilisation de l’IA présente de nombreuses opportunités. Prenons la durabilité écologique : dans les villes dites « Smart-City », l’IA est utilisée pour relier les données sur la mobilité, la consommation d’énergie et les habitudes de consommation des habitant·e·s, dans l’objectif de garantir une qualité de vie élevée tout en minimisant l’utilisation des ressources. Dans le domaine de la santé, l’IA aide déjà les médecins à reconnaître des schémas dans le diagnostic des maladies, augmentant ainsi la précision des diagnostics.
Les risques perçus et débattus autour de l’IA ne sont cependant pas minces. Le principal point de critique est la forte propension de ces systèmes à l’erreur, potentielle ou réelle, en raison de leur nature non intelligente. Ce ne sont que des applications performantes de reconnaissance de schémas réalisant des prévisions et des recommandations basées sur des données historiques et des corrélations passées. Cela peut entraîner des discriminations ou renforcer des biais existants, sur les questions de genre ou d’origine par exemple. Le potentiel futur des technologies de l’IA reste controversé ; la possibilité que ces systèmes seront un jour capables de tirer des conclusions intelligentes à partir des informations qu’ils traitent reste pure spéculation. Ce qui est certain, c’est que l’IA ne remplacera pas les capacités de prévision humaine, et qu’elle ne nous permettra pas de lire l’avenir comme dans une boule de cristal.
Connaissances et développements dans l’administration publique
Selon l’OCDE, l’IA est actuellement utilisée dans les administrations publiques principalement pour « améliorer l’efficacité des processus internes » (70 % des États de l’OCDE le déclarent). La France, par exemple, expérimente une application d’IA générative pour regrouper et prioriser les tâches des fonctionnaires. En Suède, un modèle d’IA trie et répartit 60 % des demandes reçues dans le registre central du commerce.
En Suisse, dans l’administration publique (au sens large), l’exemple de la gestion des accidents de la Suva est particulièrement frappant : alors que chaque dossier de sinistre était auparavant traité par une personne, c’est aujourd’hui le programme « Smartcare » qui s’en charge. À l’exception des accidents graves, toutes les déclarations d’accidents, factures médicales et indemnités journalières sont traitées par ordinateur. Le programme fait des prévisions de guérison et de coûts et gère les dossiers sur la base des expériences passées. Tant que tout reste dans les valeurs attendues, le système traite les indemnisations automatiquement. L’humain n’intervient qu’en cas d’anomalies ou de demandes des assuré·e·s. La Suva a constitué ce savoir en matière d’IA au fil des années et dispose de la quantité de données nécessaires pour l’exploiter raisonnablement. Le projet reste toutefois très ambitieux.
De manière générale, dans l’administration fédérale suisse, l’IA est surtout utilisée dans le cadre de projets pilotes pour la reconnaissance de texte, de voix et d’images, ainsi que pour des vérifications de plausibilité, la validation des données et la maintenance prédictive. Dans les prochaines années, les offices et les départements qui traitent déjà de grandes quantités de données devraient se pencher sur la question de la mise en œuvre de systèmes d’apprentissage automatique. Il s’agit notamment de l’Administration fédérale des douanes et de la sécurité aux frontières, des assurances sociales et de la Caisse suisse de compensation, de l’Administration fédérale des contributions, de l’Office fédéral de l’énergie et de la Commission de l’électricité (ElCom) et de l’Office fédéral de la statistique,
bien sûr. Ce dernier dirige depuis trois ans le Réseau de compétences Intelligence artificielle (KNW KI), dont la mission est de rassembler les connaissances des expert·e·s de tous les services, d’exploiter le potentiel des applications d’IA et de promouvoir ces technologies dans l’administration.